[2022] 3 R.C.F. F-21
Droit aérien
Sujets connexes : Compétence de la Cour fédérale; Pratique; Transports
Appel à l’encontre d’une décision de la Cour fédérale rejetant une requête en vue de faire autoriser l’instance comme recours collectif — Le recours collectif proposé visait à obtenir réparation pour l’appelante et d’autres passagers d’une compagnie aérienne étrangère qui ont subi des retards sur des vols à destination ou en provenance du Canada — L’intimée est une compagnie aérienne commerciale du Portugal qui offre des vols à destination et en provenance de diverses villes canadiennes — L’appelante a allégué avoir droit à une indemnisation, car son vol a été retardé de plus de quatre heures — Elle a allégué avoir droit à une indemnisation en vertu d’un contrat de transport — La Cour fédérale a rejeté la requête en vue de faire autoriser l’instance comme recours collectif au motif que l’appelante ne satisfaisait pas aux conditions énoncée au paragraphe 334.16(1) des Règles des Cours fédérales, DORS/98-106 (les Règles) — Elle a accueilli la requête de l’intimée visant à faire radier la déclaration modifiée de l’appelante sans autorisation de modifier, en vertu de l’alinéa 221(1)a) des Règles — Elle a déterminé que l’action était vouée à l’échec parce que la Cour fédérale n’avait pas compétence pour entendre l’affaire et que la demande, qui visait à obtenir une indemnité forfaitaire sans preuve de dommage, était proscrite par la Convention pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international, signée à Montréal le 28 mai 1999, qui constitue l’annexe VI de la Loi sur le transport aérien, L.R.C. (1985), ch. C-26 (la Convention de Montréal) — Il s’agissait de déterminer si la Cour fédérale a conclu à tort que : 1) l’acte de procédure devait être radié pour défaut de compétence; 2) l’acte de procédure devait être radié au motif que la demande était proscrite par la Convention de Montréal; 3) les conditions de certification d’un recours collectif n’étaient pas satisfaites — Pour trancher la première question, soit celle de savoir si l’acte de procédure devait être radié pour défaut de compétence, le critère à trois volets de l’arrêt ITO-Int’l Terminal Operators c. Miida Electronics, [1986] 1 R.C.S. 752, a été appliqué (le critère ITO) — La demande satisfaisait au premier volet du critère ITO selon la norme du caractère évident et manifeste parce qu’il y avait un argument valable selon lequel la demande était « reconnue » sous le régime du droit fédéral — Les licences délivrées par l’Office des transports du Canada peuvent être assorties de conditions sur des points précis, notamment « les tarifs, les prix et le transport de passagers » — En exigeant que le transporteur se conforme aux conditions précisées dans le tarif, on pouvait soutenir que le Règlement sur le transport aérien, DORS/88-58 (le Règlement) reconnaît les obligations contractuelles du transporteur envers les passagers — Étant donné que ces obligations avaient été invoquées comme incluant l’indemnisation demandée par l’appelante, il n’était pas évident et manifeste que le Règlement ne reconnaît pas la validité de la demande de l’appelante — La Cour fédérale a rejeté ce point de vue, suivant la décision Donaldson c. Swoop Inc., 2020 CF 1089 — Toutefois, dans la décision Donaldson, la Cour a commis une erreur lorsqu’elle a conclu qu’au paragraphe 116(5) de la Loi sur les transports au Canada, L.C. 1996, ch. 10 (la LTC), il est sous-entendu que la LTC prévoit un régime général de compétence des tribunaux — Pour ces raisons, il n’était pas évident et manifeste que le premier volet du critère ITO n’avait pas été satisfait — Ensuite, on peut raisonnablement soutenir que la mesure dans laquelle la LTC et le Règlement régissent les contrats de transport est suffisante pour satisfaire au critère du caractère évident et manifeste du deuxième volet du critère ITO — La Loi sur le transport aérien est essentielle à la décision sur l’action et fonde l’attribution de compétence — Enfin, en ce qui concerne le troisième volet du critère ITO, il n’était pas évident et manifeste que toute loi fédérale pertinente en l’espèce était inconstitutionnelle — La déclaration modifiée n’était donc pas vouée à l’échec pour défaut de compétence de la Cour fédérale — En ce qui concerne la deuxième question, à savoir si les actes de procédure devaient être radiés parce qu’ils sont proscrits par la Convention de Montréal, il a été établi clairement dans l’arrêt Association du transport aérien international c. Office des transports du Canada, 2022 CAF 211, publié après que la présente affaire a été entendue, que la Cour fédérale avait conclu à tort que cette demande était vouée à l’échec en raison de la Convention de Montréal — La Convention de Montréal n’interdit pas au Canada d’adopter des lois qui prévoient une indemnisation normalisée pour les retards de vol — Enfin, concernant la troisième question, la Cour fédérale a eu raison de conclure que l’exigence énoncée à la règle 334.16 (le recours collectif est le meilleur moyen de régler, de façon juste et efficace, les points de droit ou de fait communs) n’était pas satisfaite — Il était donc loisible à la Cour fédérale de conclure que le fardeau de la preuve de l’intimée était satisfait par des éléments de preuve qui décrivent le régime législatif applicable — Il était également loisible à la Cour fédérale d’examiner les dispositions législatives et réglementaires applicables à l’Office des transports du Canada pour évaluer ce qui était le meilleur moyen de régler les points de droit ou de fait communs — En conclusion, la Cour fédérale a commis une erreur en concluant qu’il était évident et manifeste que les actes de procédure ne révélaient pas de cause d’action raisonnable — La Cour fédérale n’a pas commis d’erreur en concluant que les exigences de certification n’étaient pas satisfaites — L’ordonnance de la Cour fédérale a été annulée dans la mesure où elle radiait la déclaration modifiée — Appel accueilli.
Berenguer c. Sata Internacional - Azores Airlines, S.A. (A-138-21, 2023 CAF 176, juge Woods, J.C.A., motifs du jugement en date du 1er août 2023, 26 p.)