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Peuples autochtones

Terres

Contrôle judiciaire de la décision rendue par le Tribunal des revendications particulières (le Tribunal), qui a jugé que la revendication particulière de la demanderesse était dénuée de fondement parce que la demanderesse n’était pas parvenue à établir que les terres en cause avaient été transférées à tort ou que la défenderesse (Sa Majesté la Reine du chef du Canada) avait manqué à ses obligations de fiduciaire à son égard — Les circonstances menant à la revendication particulière de la demanderesse ont pris naissance en 1914‑1915, lorsque 4,37 acres de terres prises à même une parcelle beaucoup plus vaste qui avait été mise de côté pour la demanderesse ont été vendus à la Pacific Great Eastern Railway Company (PGER) — Un bref survol historique a révélé le retard considérable qui avait été pris dans le processus d’établissement d’un bon nombre de réserves destinées aux peuples autochtones de la Colombie‑Britannique, dont celle qui était en cause dans la présente demande, la réserve indienne Williams Lake no 1 (RIWL no 1) — En 1914, la PGER a demandé une autorisation concernant une emprise parcourant la RIWL no 1 — En 1938, la Colombie‑Britannique a transféré la RIWL no 1, moins les terres de chemin de fer acquises par la PGER à des fins ferroviaires, au Canada — Dans sa décision, le Tribunal a examiné le principal argument de la demanderesse, suivant lequel la RIWL no 1 aurait eu un plein statut, et non un statut provisoire en 1914‑1915, et a rejeté cet argument — Le Tribunal est parvenu à la conclusion que les terres de la RIWL no 1 avaient un statut provisoire de 1881 à 1938 — Le Tribunal a conclu que toute limite inhérente à la législation provinciale relative aux chemins de fer n’empêchait pas la Couronne provinciale de prendre des mesures pour concéder des terres de la Couronne afin qu’elles soient utilisées pour des chemins de fer — Il en a déduit que la Land Act, R.S.B.C. 1911, c. 129, habilitait expressément la Couronne provinciale à concéder les terres de chemin de fer à la PGER — Selon le Tribunal, indépendamment de la nature provisoire ou non du statut de la réserve, la défenderesse avait à l’égard de la demanderesse l’obligation de fiduciaire d’intervenir en son nom dans le processus de création de réserves — Le Tribunal a ajouté que la défenderesse avait une obligation d’atteinte minimale à titre de fiduciaire — Il a conclu que le Canada avait respecté ses obligations de fiduciaire en soupesant les options et en utilisant l’indemnité pour répondre à d’autres besoins de la demanderesse plutôt qu’en essayant d’obtenir une réparation douteuse par l’acquisition de terres de remplacement provinciales — Par conséquent, le Tribunal a‑t‑il décidé, le bien‑fondé des motifs invoqués au titre de l’art. 14 de la Loi sur le Tribunal des revendications particulières, L.C. 2008, ch. 22 (LTRP), n’avait pas été établi — Il s’agissait principalement de savoir si le Tribunal a déraisonnablement conclu que la défenderesse n’a pas manqué à ses obligations de fiduciaire à l’égard de la demanderesse si on en juge par la jurisprudence qu’ont établie les tribunaux, et notamment le Tribunal lui‑même, sur la question de l’étendue de ces obligations — En l’espèce, le Tribunal a conclu que, parce que la Colombie‑Britannique serait probablement réticente à coopérer à la procédure de transfert de terres de remplacement, la défenderesse était, dans les faits, dispensée d’avoir à envisager cette option — Cette conclusion a dérogé aux principes de common law régissant l’étendue de l’obligation d’atteinte minimale de la Couronne — En bref, la défenderesse ne pouvait pas invoquer le probable manque de coopération d’une province pour justifier un manquement à ses propres obligations de fiduciaire, même si cette réticence pourrait, en soi, constituer un manquement à une obligation de fiduciaire — Il s’ensuit que le Tribunal a conclu de manière déraisonnable que le manque probable de coopération de la Colombie‑Britannique justifiait l’action de la défenderesse en l’espèce — Le Tribunal a aussi esquivé la question de savoir si la défenderesse aurait dû demander que la PGER obtienne, plutôt qu’un intérêt en fief simple, une servitude sur les terres de chemin de fer — Il n’a pas non plus examiné les incidences de la chronologie des actions de la défenderesse, par exemple la rapidité avec laquelle cette dernière a agréé à la demande de la PGER et accepté l’évaluation des terres de chemin de fer, alors qu’elle a pris tout son temps pour donner suite à la demande de terres de remplacement soumise par la demanderesse — Le principe de l’atteinte minimale imposait au Tribunal l’obligation d’examiner toutes ces options avant de décider que la revendication particulière de la demanderesse n’était pas fondée — Chacune aurait pu offrir une avenue de choix à la défenderesse, peu importe à quel palier de gouvernement appartenait l’intérêt de la Couronne dans les terres de chemin de fer — Étant donné que le Tribunal n’a pas examiné de manière adéquate ces différentes options moins attentatoires, sa décision ne pouvait être maintenue — Par conséquent, la décision du Tribunal a été annulée et la revendication de la demanderesse a été renvoyée au Tribunal afin qu’il la réexamine conformément aux présents motifs — Demande accueillie.

Première Nation de Williams Lake c. Canada (Affaires autochtones et du Nord) (A-341-18, 2021 CAF 30, juge Gleason, J.C.A., motifs du jugement en date du 17 février 2021, 23 p.)

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