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Pratique

Parties

Intervention

Demande d’autorisation d’intervenir dans un appel interjeté à l’encontre d’une décision rendue par la Cour fédérale (2019 CF 950), qui a rejeté la demande de contrôle judiciaire de la décision du commissaire à l’intégrité du secteur public, qui avait refusé de faire enquête sur des allégations selon lesquelles des fonctionnaires de l’ambassade du Canada à Mexico avaient omis de respecter les politiques du gouvernement du Canada en matière de protection des défenseurs des droits de la personne et omis de signaler en temps opportun un acte de corruption — Le commissaire a conclu qu’il ne s’agissait pas d’« actes répréhensibles » pour l’application des art. 33(1) et 8d) et e) de la Loi sur la protection des fonctionnaires divulgateurs d’actes répréhensibles, L.C. 2005, ch. 46 — En 2007 une société minière canadienne, Blackfire Exploration Ltd., a ouvert une mine de barytine dans l’État du Chiapas, au Mexique — La population locale s’est opposée à la mine et a tenu des manifestations devant l’ambassade du Canada à Mexico et érigé un barrage sur l’une des voies de transport menant à la mine — En 2009, le chef du mouvement d’opposition, M. Abarca, a été arrêté et détenu sans inculpation pendant huit jours — Les appelants ont fait valoir que M. Abarca a été assassiné en 2009, peu après avoir déposé une plainte auprès de la police contre deux employés de Blackfire qui avaient proféré des menaces à son endroit — Le commissaire devait déterminer si, en aidant Blackfire à faire face à l’opposition politique et sociale suscitée par la mine et en assurant la liaison entre Blackfire et les administrations locale, nationale et de l’État sur les exigences réglementaires à respecter, les membres de l’ambassade avaient, par leurs actions ou leur inaction, agi conformément aux politiques du gouvernement du Canada en matière de respect du droit international coutumier, ainsi qu’aux politiques officielles du Canada en matière de protection et de promotion des droits de la personne — Les appelants étaient d’avis que ces actions ou cette inaction avaient contribué aux dangers auxquels M. Abarca avait été exposé — La deuxième allégation portait sur un acte de corruption, les appelants faisant valoir que l’ambassade n’a pas signalé cet acte en temps opportun — L’intimé a consenti à la requête en autorisation d’intervenir présentée par Canadian Lawyers for International Human Rights, la International Justice and Human Rights Clinic (CLIIHR/IJHRC) et Amnistie internationale, mais s’est opposé à la requête du Centre for Free Expression de l’Université Ryerson (CFE), alléguant que ce dernier ne répondait pas au critère de l’intervention prévu à la règle 109 des Règles des Cours fédérales, DORS/98‑106 — Il s’agissait de savoir si les requêtes devaient être accueillies — Une partie ne peut pas « consentir » à une requête en autorisation d’intervenir : elle peut l’appuyer, s’y opposer ou s’abstenir de prendre position — Les parties ne peuvent « consentir » qu’à des questions de procédure, comme un retard dans l’achèvement d’une étape de la procédure qui serait à leur avantage — La question de savoir si une intervention devrait être autorisée est une question de fond; par conséquent, le consentement d’une partie importe peu — La Cour doit conclure que l’intervention est, dans l’ensemble, dans l’intérêt supérieur de la justice — Si l’intimé estime que les requêtes devraient être accueillies, il devrait le dire et expliquer sommairement pourquoi il en est ainsi — Dans une requête présentée en application de l’alinéa 109(2)b) des Règles, la partie doit expliquer de quelle manière elle désire participer à l’instance et en quoi sa participation aidera la prise d’une décision sur toute question de fait et de droit se rapportant à l’instance; la Cour évalue et soupèse ensuite ces observations en regard des facteurs énoncés dans l’affaire Rothmans, Benson & Hedges Inc. c. Canada (Procureur général), [1990] 1 C.F. 74 (1re inst.), conf. par [1990] 1 C.F. 90 (C.A.) — Ces facteurs sont notamment la question de savoir si la personne qui se propose d’intervenir est directement touchée par l’issue du litige; s’il y a une question qui est de la compétence des tribunaux ainsi qu’un véritable intérêt public — Il n’est pas nécessaire que tous ces facteurs soient réunis, et certains peuvent peser davantage que d’autres — Les critères ne sont pas normatifs — Le critère dominant est de savoir si la Cour sera mieux en mesure d’examiner les questions en litige grâce à la présence de l’intervenant — Si l’on reprend les facteurs énoncés dans la décision Rothmans, aucune des parties en l’espèce n’était « directement touchée », c’est‑à‑dire qu’aucune n’avait le même degré d’« intérêt direct » qu’aurait normalement une entité ou une personne ayant pleine qualité de partie — Ce facteur ne constituait toutefois pas un obstacle — Pour faire valoir un intérêt véritable, la personne qui souhaite intervenir doit démontrer qu’il existe un lien entre le point en litige et son mandat et ses objectifs — Elle doit préciser l’origine de son intérêt véritable, et l’on doit pouvoir clairement établir à partir de ses observations ce qui justifie son intervention — Pour établir l’existence d’un intérêt véritable, l’intervenant doit manifester plus qu’un intérêt de « nature “jurisprudentielle” » — En l’espèce, les intervenants proposés ont, dans leurs déclarations sous serment, fourni un bilan historique de leur participation à différents aspects des questions de droit dont la Cour était saisie — La principale question était de savoir si l’intervenant fournira à la Cour d’autres perspectives utiles qui l’aideront à statuer sur l’affaire — Cette aide peut revêtir diverses formes — En l’espèce, les observations des intervenants reposaient sur leur compréhension du droit international (tant le droit coutumier que le droit des traités) et sur le rôle qu’il joue dans l’interprétation des lois nationales — L’intérêt du CFE diffère – il porte principalement sur l’essence et la portée de la Loi — La requête d’un intervenant proposé sera rejetée si les observations de cet intervenant répètent dans une large mesure celles déjà formulées par les parties ou si elles ne sont pas suffisamment distinctes; mais ce n’était pas le cas en l’espèce — La Cour a examiné les circonstances et les faits particuliers de l’affaire qui faisait l’objet de la demande d’intervention — En l’espèce, aucun fait précis ne militait contre l’intervention d’Amnistie internationale, de CLIHR/IJHRC ou du CFE — La Cour a conclu que les intervenants proposés ont montré qu’ils avaient un intérêt véritable dans l’affaire dont la Cour a été saisie, que les observations qu’ils ont proposées n’étaient répétées par aucune des parties et qu’il serait dans l’intérêt de la justice de leur accorder la qualité d’intervenant — En outre, bien que les interventions se soient inscrites dans le contexte d’une question de politique générale sur le rôle du Canada dans la promotion des droits de la personne à l’étranger, elles ne cherchaient pas à amener la cour à se prononcer sur le fond de cette question — Toutes portaient sur la bonne interprétation d’une loi; les arguments ne soulevaient pas de considérations géopolitiques — Requêtes accueillies.

Gordillo c. Canada (Procureur général) (A-290-19, 2020 CAF 198, juge Rennie, J.C.A., motifs de l’ordonnance en date du 16 novembre 2020, 12 p.)

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